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dimanche 17 juillet 2011

Le 6 mai 2011, la rature est la manifestation de la joie d’écrire ; et le poète a le dessein d’aller marcher dans la douceur un peu venteuse ardéchoise et d’aller voir la seconde installation de Martine Diersé (dont l’un des éoliens de Combier, apprendra-t-on le soir, s’est cassé, mystérieusement (la principale hypothèse évoquée sera le vent, qui souffle avec force, et sans relâche, depuis plusieurs jours, et non pas la dégradation volontaire de quelque aigrefin de passage ou autochtone, que nenni, M. ne pense pas, qui gratifiera l’assemblée d’un délice de cailles farcies et de gratin d’aubergines)), la seconde installation de Martine Diersé, sur le « sentier d’art », est une stèle (pourquoi une stèle ?... poser la question (et y penser)). Le poète stationne la voiture à Cluac, près de l’église, à l’ombre. La route monte légèrement, serpente, le paysage a encore verdi, depuis le mois dernier, ce qui pourra mener le lecteur à déduire qu’il embellit, déduction non tellement empreinte d’erreur : le poète confirme, ce n’est pas beau, il estime que cela est beau, et ses yeux font considérer à la pensée qu’un certain embellissement a gagné du terrain (il faudra couvrir ce carnet, se dit-il, qui, à force d’être bringuebalé et manipulé, s’abîme progressivement). Au loin, les monts ardéchois sont enveloppés de brume de chaleur. À droite, un sentier descend vers l’installation, à la source de La Dunière (rivière), le poète se dit qu’il relirait bien Arno Schmidt, et nous pouvons convenir que cette pensée est incongrue, mais elle fut une passante enthousiasmante, et qu’il ajouterait à son dossier ces vers d’André Du Bouchet, poète et marcheur-penseur, lus le matin même dans un article consacré à deux livres juste parus et posthume dans  (Aveuglante ou banale. Essais sur la poésie, & Une lampe dans la lumière aride – Carnets 1949-1955, aux éditions Le Bruit du temps) :

« Il n’y a pas qu’à dire ce que l’on vit
Ce que l’on sait
et tout est inventé »

Ces deux magnifiques chevaux ne se soucient nullement d’un poète qui passe et parle seul ; qui arrive à ladite installation stèle, sorte de coquillage sur un socle qui ne sera pas sans rappeler quelque monstre marin issu d’une fable antique (mais lequel et laquelle ?) ; ce considéré, poser l’oreille contre est supposé faire entendre la mer. Le poète prendra de nouvelles photos, de cette œuvre.

mardi 12 juillet 2011

Le 5 mai 2011, le poète bute sur le deuxième poème, « De l’énergie », il n’est pas dans son écriture, il manque la forêt  (Brocéliande), son antre et son silence, l’air ouestien, la bibliothèque, les dictionnaires, l’ordinateur personnel, le potager (où se rendre (en plein travail (une dizaine de minutes (en grignotant fromage ou saucisson (pour couper (et mieux re-concentrer et canaliser l’énergie de la relance et du lancement d’écrire) un peu d’herbe (ou prévoir les tâches jardinières de l’après-midi, ou estimer les pousses, ou cueillir quelques légumes et autres douceurs matinales idoines)))))) ; ensemble qui manque à la bonne forge, ainsi que (...)... Mais, l’opiniâtreté apporte de nouveaux éléments : un mot, un bout de phrase, une ponctuation et ::::: il a noté deux citations, de Baudelaire « L’ennui, fruit de la morne incuriosité » (Les Fleurs du mal, LXXVI) et de Pessoa, « L’ennui est la sensation du chaos, c’est la sensation que le chaos est tout. Le bailleur, le maussade, le fatigué, se sentent prisonniers d’une étroite cellule. Le dégoûté, par l’étroitesse de la vie, se sent prisonnier d’une cellule plus vaste. Mais l’homme en proie à l’ennui se sent prisonnier d’une vaine liberté, dans une cellule infinie » (Le Livre de l’intranquillité), grands crédits penseurs de l’ennui, le grand ennui qui désanime les vivants ; muni de cela, le poète pourra forcer l’apparition du poème. Le poète est une machine inventive et ingénieuse qui nécessite énergie qu’il puise en lui-même pour se relancer et relancer encore et obstinément, sinon l’ennui guette et pèse. Hier, le poète est allé rencontrer la libraire de Lamastre (Myriam Bert, L’Arbre à feuilles), où il fera, en juin, une lecture des ses proses de récit, une librairie-papeterie-brocante tenue par une libraire courageuse et sympathique et guère inquiète de l’avenir du livre, il achètera deux bouteilles de vin chez le caviste du village, un vin de pays des coteaux de l’Ardèche (Domaine de Vigier) et un Saint-Joseph (vignoble de la Tour d’Arras), intrigué et séduit par la charte du couple de vigneron (Catherine et Pascal Jamet), dite « Charte de Grenette » :

Notre démarche Greenette


C’est notre engagement, là où cela est possible, de développer et de garantir des pratiques respectueuses de l’environnement, durables et le plus proche possible de la nature afin de produire des vins qui exprime vraiment leurs terroirs. Nous pratiquons aussi certains de ces principes (biodiversité, enherbement, limitation des phytos, pas d’insecticides, pas de fertilisation minérale, fournisseurs locaux ) sur les autres parcelles de notre vignoble.

# A la vigne
Maintient de la biodiversité : nombreuses sélections de syrah, limitation de l’utilisation des clones, sauvegarde de vieux cépages locaux.
Maîtrise de l’enherbement par binage, buttage et débuttage au cheval et par tonte.
Pas de fertilisation minérale.

Protection phytosanitaire sans pesticides de synthèse. Pas d’insecticide ou d’anti pourriture. Pas de traitements à moins de 60 jours des vendanges.


# A la cave
Aucuns intrants hormis du souffre (so2 ) en limitant les doses. Pas de levurage, pas d’acidification, tannisage, enzymage, copeaux…
Pas d’ajout de sucre ( chaptalisation ) ou de  moût concentré.
Pour les rouges, mise en bouteille sans collage ni filtration.

# Mise en bouteille
Utilisation de bouteilles plus légères ( 480 g au lieu de 600 g ) et de bouchons naturels non traités.

mardi 5 juillet 2011

Ordi-1, dit Jokerman, vit dans la pièce principale de l’appartement ; Ordi-2, dit Lucida Handwriting, dans une pièce du même appartement considérée comme une annexe de l’association des Rias. Ordi-1 n’ouvre pas les fichiers de la clé USB, à cause d’une version d’Open Office incompatible avec les fichiers enregistrés sous word 2007 de ladite clé, mais se connecte à la boîte wifi, il est près de la fenêtre, Ordi-2 quand, lui, est fourni d’une version plus récente d’Open Office, compatible alors avec les fichiers word. Voilà l’exposition. Sur Ordi-1, le poète ne peut faire autre chose que consulter internet ou réceptionner voir envoyer des courriels depuis sa webmail, or il lui faut souventes fois naviguer sur internet tout en écrivant dans le carnet qui lui sert de support de travail et de saisie, et c’est sur Ordi-2 qu’il va saisir, à l’aide de sa clé USB, ce qu’il a écrit ; ce qu’il a fait en fin de matinée.
Mais.
Après déjeuner et une courte sieste, décidé à reprendre le travail, il allume Ordi-2, ouvre son fichier « Blocs (& Journal afférent) », puis le document word du même nom, et constate, alors dépité, si ce n’est découragé, voire écoeuré, évidemment en colère contre l’informatique, et agacé par sa mal-maîtrise de l’outil, constate que la page saisie ce matin, qui lui demanda une heure de travail (les pages du carnet saisies étant revues : raccourcies ou développées), que la page saisie ce matin avait disparu ; le poète ne sachant nulle-ment comment on récupère un fichier, raison de plus de maudire sa mal-maîtrise et sa méconnaissance et sa réticence de et à l’outil, et soupçonnant stupidement une conspiration numérique. Il lui fallait recommencer, tâche qu’il décida de reporter aux calendes grecques de sa journée.
Mais.
Ce n’est pas tout !
Il fut décidé, à l’occasion de la résidence du poète en terre ardéchoise et pour réfléchir à la notion d’air/souffle/inspiration comme troisième volet de sa tétralogie « La rêverie au travail » (comme on met les muses au bordel), d’ouvrir un blog intitulé « Rêverie au travail » afin de rendre public, voire participatif, l’atelier du poète au travail. La mise en ligne d’une page ne présente guère de difficultés... à qui, encore une fois, maîtrise. Or, le poète au travail se trouve devant le nouveau constat, quelques minutes après le premier, ayant décidé de passer à la tâche suivante afin de ne pas rester sur un échec cuisant et dans le sentiment de n’avoir rien fait de sa journée, devant le nouveau constat d’une page illisible : la longue citation de Platon sur l’inspiration est en caractères noirs au lieu de blancs, ce qui, sur un fond sombre, rend le texte illisible. Nouveau constat et nouveau dépit et nouveau découragement et nouvel écoeurement et nouvelle colère et nouvel agacement, et renforcement de la conviction de la chronophagie du numérique. Ordi-2 regarde le poète de son grand œil-écran, narquois. Le poète se lèvera, enfilera ses godillots de marche, et ira marcher. C’en est terminé de cette aventure inintéressante du poète confronté à la malignité d’Ordi-1 et d’Ordi-2.


(Plus tard, dans le même jour :) Note en marchant : qu’il y a, chez les poètes prétendument et soi-disant inspirés, une intention d’échapper au réel, à la réalité, au monde ; la croyance (italique, gras, souligné) en une instance supérieure et divine qui dicterait et donnerait le poème ; or que contrairement, le travailleur verbal, homo faber devant le non-éternel, les affronte et creuse dedans pour en extraire une matière brute qu’il forgera avec volonté et talent.